JE SUIS FATIGUÉE, MAIS JE ME SOIGNE* |
La fatigue est sans doute la plainte la plus couramment énoncée. Deux personnes sur trois en consultation affirment souffrir de fatigue. Pourtant, nous évoluons dans une société de performance où la fatigue n’a pas sa place. La course trépidante à la réussite et à l’Avoir, aggravée par notre besoin de reconnaissance, nous oblige à accélérer notre processus d’adaptation. Il nous faut en permanence, dans notre vie de tous les jours, mobiliser sans ménagement notre énergie, jongler avec un emploi du temps surchargé, être disponible pour la famille, les enfants, les courses, la maison, le travail… au point d’oublier aussi cette plage indispensable qu’est la coupure, d’où cette fatigue insidieuse qui s’installe sans que l’on puisse trouver un véritable espace de repos.
La fatigue d’origine psychologique est due à un contrôle des émotions coûteux en énergie. Si l’émotion ne dure qu’un temps, l’émotionnel (qui résulte des émotions) et les actions régulatrices réduisent notre tonus et entraînent de la fatigue. Conflits, oppositions, motivations contradictoires, choix difficiles (qu’ils soient professionnels ou personnels) épuisent nos énergies et provoquent de la fatigue. Il faut donc être très attentif à notre comportement physique et mental.
La fatigue chronique se traduit par une très grande fatigue évoluant de façon épidémique chez de jeunes adultes au niveau intellectuel élevé. Ce syndrome que les Américains ont nommé Yuppies Syndrom*estresponsable d’un état d’épuisement intense, accompagné de troubles communs à beaucoup d’autres maladies, qui se manifeste par une lassitude sévère et continue qu’aucun repos ne vient apaiser. Elle perdure depuis plus de six mois et conduit le malade à abandonner toutes ses activités. On note également la présence d’au moins huit des symptômes suivants : épuisement après un effort physique, maux de gorge, maux de tête, faiblesse, douleurs musculaires et articulaires, troubles du sommeil (hypersomnie ou insomnie), troubles de l’appétit (boulimie ou anorexie), côlon irritable, crampes abdominales, irritabilité, frissons, suées nocturnes, difficultés de concentration, pertes de mémoire, confusion, dépression.
Ce syndrome de fatigue chronique toucherait plus spécifiquement de jeunes cadres dynamiques majorant leurs journées surchargées de travail par des exercices physiques intenses et des sorties nocturnes. Certains spécialistes pensent que la fatigue chronique est une réponse psychologique de l’organisme à une situation de stress à laquelle il est impossible de faire face et qui se traduit par certains symptômes physiques.
Dans la fatigue chronique, l’asthénie évolue depuis quelques mois et n’est pas modifiée par le repos. Elle diminue de plus de 50 % le rendement d’une activité normale.
Pour le sociologue David Le Breton*, «La fatigue croissante n’est que le symptôme de la perte de sens résultant de l’accélération et de la pression que nos contemporains subissent chaque jour. Cela aboutit à un sentiment de dépossession de soi. » Pour lui, la question de la fatigue pose donc essentiellement celle du goût de vivre.
Les symptômes de la fatigue les plus fréquemment décrits sont les suivants :
– douleurs musculaires : contractures, lombalgies, crampes, tremblements, baisse de la résistance à l’effort ;
– troubles du sommeil : difficultés d’endormissement, insomnie ou hypersomnie, sommeil agité ;
– troubles intellectuels : diminution du rendement intellectuel, difficultés de concentration, troubles de la mémoire et de l’attention ;
– troubles sexuels : diminution ou perte du désir sexuel, baisse de l’activité sexuelle, impuissance ou frigidité ;
– troubles digestifs : diarrhée, constipation, modification du comportement alimentaire, spasmes intestinaux ;
– troubles du caractère : irritabilité, hyperémotivité, difficultés relationnelles, intolérance au bruit, anxiété, tristesse, pessimisme, démotivation ;
– troubles somatiques : palpitations, gorge nouée, troubles visuels.
* Association de la fatigue chronique Internet : asso.nordnet.fr/cfs-spid
* La sociologie du corps, P.U.F., 1992.
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